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10 février 2025 |
Le L-9, avec le massif d'origine
Version de la série II type L Leninets, spécialement développée pour la flotte du Pacifique.
Elle s'en distingue par un canon avant plus protégé que sur les série 2.
Grands sous-marins mouilleurs de mines, six unités sont construites entre 1934 et 1938.
Elles ont uniquement servi en flotte du Pacifique.
La décision de construire une version particulière des types L pour l'extrême Orient est prise le 13 août 1933. La construction et le transport de ces unités est examinée aux chantiers navals de la Baltique le 3 décembre de la même année. En janvier 1934, des collaborateurs du ministère de la construction navale examinent la possibilité de transférer ces sous-marins par la mer. A cette fin, il est envisagé de faire construire des pétroliers capables de transporter des charges de 10 000 t, bâtiments à construire au chantier André Marty de Nikolayev. Les délais pour une telle opération se montent à 6 ou 7 mois, dès lors que les contours des sous-marins sont définis. Le porteur ne servirait que de l'ordre de 8 mois.
Le 2 février un décret du Conseil du Travail et de la Défense du Conseil des Commissaires du peuple de l'Union soviétique lance la commande de sous-marins de la classe IIBis (renommé classe XI par la suite). Dès le mois de mars, les plans sont prêts. Ils prennent en compte l'expérience retirée avec les série II et la nécessité d'un transport terrestre. Des équipements prévus pour la classe E-2/N (devenue type S par la suite) comme les ensembles d'air HP, les accouplements BAMAG etc... étaient fournis par la société allemande Dechimag. Le coût de construction est évalué à 13 millions de roubles.
Le transport par voie ferrée des six sous-marins va s'effectuer en les répartissant en 18 grandes et 24 petites sections, réparties sur 48 wagons, dont 10 de 50 t. Le gabarit maximal des voitures chargées était inférieur de seulement 12 mm de chaque côté par rapport à celui de la voie ferrée.
La construction débute réellement après la résolution n° 45 du Conseil du Travail et de la Défense du Conseil des Commissaires du peuple de l'Union soviétique: trois unités seront construites aux chantiers de l'Amirauté à Leningrad et trois à l'usine Marty de Nikolayev. Si les cinq premiers étaient destinés aux forces navales d'Extrême-Orient, le dernier de la série était sensé rester en mer Noire. Ce qui ne sera pas le cas.
Ils sont mis sur cale entre le 10 avril et le 10 juin 1934. Leur achèvement devait se faire aux chantiers de l'Amur de Komsomolsk Na Amure, le tout sous la responsabilité des chantiers de la Baltique, en charge du projet. Une succursale devait en être établie sur place. Mais il est rapidement apparu que le chantier de l'Amur n'avait pas les capacités de livrer toute la série dans les temps. C'est pourquoi les quatre dernières coques (dont les trois préparées à Leningrad) ont été transférées directement au chantier Dalzavod à Vladivostok, et l'éventualité de la mise en place d'une succursale des chantiers de la Baltique à Komsomolsk est abandonnée.
Les dates de livraison étaient très strictes: les deux premières unités devaient être livrées à la fin de 1935, les autres au plus tard au troisième trimestre de 1936. Un tel rythme a conduit à prolonger la durée de travail quotidienne des chantiers jusqu'à onze heures, et les employés étaient libérés des obligations militaires et du Parti. Les 760 employés des chantiers de la Baltique ont ainsi fait 76 000 heures supplémentaires en un mois!
Le premier convoi quitte Leningrad dès le 30 septembre 1934, sous le régime des transports militaires, les wagons étant fournis et entretenus par le Commissariat populaire aux chemins de fer (NKPS). Mais les difficultés de l'usine Kolomna (moteurs), et de l'usine n°2 (accumulateurs) font que le premier sous-marin des chantiers de l'Amur (Voroshilovets) n'entre en essais que le 31 octobre 1936, alors qu'à cette date quatre unités étaient sensées avoir été livrées. Par ailleurs, un incendie survenu au troisième trimestre 1937 va rallonger ce délai. L'incendie détruit les radios, les gyrocompas, les loch Forbes, quatre jeux de tube lance-mines, les pièces de rechange des moteurs, les dispositifs de chargement des torpilles, des composants en ébonite et caoutchouc de la ventilation des batteries, des tachymètres, des tuyauteries de refroidissement et de lubrification des Diesel. Ce n'est que le 22 juillet 1937 que les L-11 et L-12 sont transférés sur barge à Nikolayevsk sur l'Amur, avant de rallier Vladivostok. Le coût annoncé par le chantier de l'Amur était de 16,4 millions de roubles. Il s'élèvera en fait à 22 millions.
Le L-7, premier de la série, n'est recetté que le 10 décembre 1936, et le L-12 n'est admis au service actif que le 9 décembre 1938.
La série XI présente les différences suivantes:
- allongement d'un mètre de la proue qui reçoit une étrave inclinée
- la coque est ré-aménagée pour une meilleure répartition des masses pour le transport ferroviaire
- l'habitabilité est améliorée en modifiant les schémas d'aménagements des locaux vie, ce qui a conduit à l'ajout d'une nouvelle tranche. Le sous-marin en comporte dorénavant sept
- le local batterie est réalisé sur le même modèle que celui de la série I
- les deux périscopes sont placés dans un cylindre placé au dessus de la coque épaisse, pour augmenter l'immersion périscopique et éviter les abordages
- les compresseurs électriques BP sont supprimés, et le soufflage initial des ballasts est effectué au moyen des moteurs Diesel
- l'accès aux commandes pneumatiques des vannes Kingston des caisses du ballast principal sont maintenant possibles
- amélioration des commandes pneumatiques d'ouverture des vannes Kingston
- suppression des moteurs électriques silencieux, leur rôle étant repris par les moteurs électriques principaux
- suppression des caisses de flottaison
- installation d'un désalinisateur électrique Engish
- remplacement des collecteurs en acier par des collecteurs en bronze, pour toutes les parties en contact avec l'eau de mer, pour lutter contre la corrosion
- les silencieux d'échappement en deux étages des Diesel s'inspirent de ceux de la série X
- les ensembles mobiles des différentes barres sont de modèle aéronautique
- les vannes Kingston des caisses de ballast fonctionnent selon un principe différentiel
- la caisse de ballast arrière n'a pas de vanne Kingston, mais de simples dalots
- installation d'une commande de gouvernail supplémentaire sur le pont
- utilisation de manchons d'accouplement BAMAG entre les moteurs électriques et les lignes d'arbre, pour accélérer le passage à une propulsion Diesel
- emport de quatre torpilles de réserve supplémentaires
- abaissement du niveau des tubes lance-mines
- les butées de palier des lignes d'arbre sont équipés d'un limiteur d'effort
- installation d'une pompe d'assiette particulière, avec un débit de 6 à 8 t/h
- le poste de contrôle des moteurs électriques a été remplacé par deux pupitres séparés, un par bord
- mise en place d'une nouvelle artillerie: un canon de 100 m B-24-PL et un canon de 45 mm 21-K
- la baignoire et l'armement avant sont carénés
Le sous-marin dispose d'une coque et demi, avec une étrave inclinée et une poupe en tronc de cone. Les coques épaisses et externes sont rivetées.
La coque résistante d'un diamètre de 4,85 m est divisée en sept tranches par des cloisons résistantes. Quatre d'entre elles sont sphériques et résistent à une pression de 6 kg/cm² et deux sont planes et résistent à une pression de 1 kg/cm² (entre les tranches IV et V et les tranches VI et VII). Les portes sont de forme ovale et reposent sur des gonds. Le kiosque a la forme d'un cylindre horizontal et peut servir de sas d'évacuation.
Les caisses d'assiette sont placées à l'extrême avant de la tranche I et l'extrême arrière de la tranche VII. Les caisses de compensation torpille et du collecteur principal étaient placées en tranche I. Les caisses à carburant se répartissaient dans les fonds des tranches II et IV, sous les locaux batterie. Les caisses de plongée rapide et de réglage étaient installées dans les fonds du central (tranche III). Les caisses à huile des moteurs Diesel se trouvaient dans les fonds de la tranche V.
La coque est divisée en sep tranches ainsi réparties:
- tranche I: tranche torpilles. Y sont installés les six tubes lance-torpilles en acier de 533 mm, les dix torpilles de réserve, les bouteilles d'air de lancement, les mécanismes des barres de plongée avant et du guindeau, une pompe de cale à piston. Les couchettes de l'équipage étaient à trois niveaux et elles étaient répartie entre les parois et la partie centrale de la tranche, certaines servant de table pour les repas. On y trouvait enfin le panneau d'embarquement des torpilles et un sas d'évacuation.
- tranche II: accumulateurs avant. Sur le pont vie sont logés le commandant et le commissaire en cabine individuelle. On y trouve également le carré officier, les cabines des officiers et des starshines, le poste du navigateur, la cuisine une douche et un WC Deux groupes de batteries occupaient le parquet inférieur
- tranche III: central. Y sont rassemblés toutes les commandes des systèmes de plongée, de l'air HP, des barres de plongée, du gouvernail, de la purge d'urgence du ballast principal, de la pompe d'assiette, de la caisse de réglage et des pompes de cale. cette tranche est relié à toutes les autres par des tuyaux acoustiques et des lignes téléphoniques. Cette tranche comporte aussi le PC radio, une station électrique, les moteurs électriques du gouvernail, une pompe d'assèchement centrifuge et un panneau d'accès au kiosque. Les munitions d'artillerie sont stockées au parquet inférieur.
- tranche IV: accumulateurs arrière. Dans cette tranche sont regroupés un compresseur électrique HP, un régulateur de tension, des couchette à trois niveaux et un WC LA soute est occupée par le troisième groupe d'accumulateurs.
- tranche V: Diesel. En plus de deux moteurs Diesel, la tranche est équipée des bouteilles d'air HP de lancement des moteurs, des accouplements BAMAG avant, des caisses alimentaires d'huile des moteurs et d'un refroidisseur de cette huile.
- tranche VI: moteurs électriques principaux. La tranche comporte outre ces deux moteurs à double enroulement et leurs tableaux de commande, l'extrémité des tube lance-mines, les accouplements BAMAG arrières, les paliers de butée Mitchell et une pompe de cale à piston. Le comportement est accessible de l'extérieur par un panneau étanche.
- tranche VII: locaux vie. Outre des couchettes pour l'équipage, on y a placé un compresseur d'air HP, les mécanismes des barres de plongée, les tubes lance-mines.
Les ancres de surface ou de plongée se trouvaient à l'avant, ainsi que les apparaux d'amarrage et de remorquage. Un guindeau, des bouées de détresse et une embarcation prenaient place dans les superstructures
Le ballast principal est réparti en neuf caisses, huit latérales et une arrière. Les caisses 3,4, 6 et 7 permettent l'emport de carburant. Les caisses peuvent être remplies ou purgées à distance par commandes pneumatiques, les commandes manuelles étant conservées. Les vannes Kingston des caisses latérales sont du type différentiel, la caisse arrière en étant dépourvue. Avec les vannes Kingston préalablement ouvertes, et avec le remplissage de la caisse d'immersion rapide, le sous-marin plonge à l'immersion périscopique en 70 à 75 s sans erre. L'émersion totale en soufflant une caisse quelconque avec un Diesel demande 5 min 55 s. Avec le soufflage d'urgence de tous les ballasts l'émersion depuis l'immersion périscopique est réalisée en 3 min 47 s.
La tuyauterie d'eau de mer est réalisée en cuivre, et leur armature en bronze. La pompe d'épuisement une Rateau R-130 centrifuge de 250 t/h, tandis que les deux pompes d'épuisement TP-18 ont un débit de 15 t/h. L'assiette est maintenue au moyen d'une pompe spécialisée de 6 à 8 t/h.
L'air HP à 200 kg/cm² est stocké en bouteille de 78 l avec une capacité de totale de 7 m3 dans la coque épaisse. Elles sont remplies à l'aide de deux compresseurs électriques EK-6 de 8 l / min à 225 kg/cm². Il faut six heures pour les remplir.
Le sous-marin dispose d'une propulsion Diesel-électrique classique, du type hybride parallèle. La navigation en surface et la recharge des batteries s'effectue grâce à deux moteurs Diesel 42BM6 de l'usine Kolomen. En plongée, il est fait appel à deux moteurs électriques à double enroulement du type PG 84/5+84/50. Pour la marche silencieuse, les enroulements sont disposés en série, et en parallèle pour les vitesses rapides. Leur réversibilité est assurée par un montage électrique adéquat pour inverser les poles d'alimentation. Leur double enroulement permet de se passer de moteurs électriques silencieux. La liaison entre les divers moteurs et les lignes d'arbre est assurée au moyen de manchons d'accouplement à friction BAMAG (Berlin-Anhaltische Maschinenbau AG.).
L'énergie électrique est stockée dans trois groupes de 112 éléments de type LS chacun. La charge à courant fort sous 220 V dure 1,3 h. Le nombre impair de groupes imposait de les connecter qu'en parallèle. La ventilation couvre l'ensemble des blocs. Un régulateur de tension est installé pour obtenir une tension constante pour l'éclairage et quelques mécanismes.
Deux périscopes d'importation* sont installés, un type S pour l'attaque, un type D pour la veille. L'appareil acoustique passif est un Merkuriy Mars-16 (ou 12 selon les documents consultés). Les L-8, L-11 et L-12 sont équipés dès 1944 du sonar Drakon-129 reçu dans le cadre de l'accord Prêt-Bail (Lend-Lease). Les L-7, L-9 et L-10 en sont équipés en 1945.
La dotation radio est inconnue, mais très probablement celle d'un ensemble BLOKADA.
La commission de recette relève les défauts suivants:
- vitesse et autonomie annoncées ne sont pas respectées
- le système de mouillage de mines est trop bruyant, et la commission recommande un remplacement du système à rouleaux par un système à câbles
- les clapets des silencieux ne se ferment pas correctement dès lors qu'il s'y trouve un dépôt de sel
Les six sous-marins sont mis en service entre décembre 1936 et décembre 1938 et ils restent en flotte du Pacifique. Leur carrière opérationnelle les verra tantôt affectés à Vladivostok, tantôt au Kamchatka. La guerre contre la Japon ayant été de courte durée, quatre missions de combat sont menées en avril et mai 1945, principalement pour débarquer troupes et matériels sur les îles des Kouriles.
Ils effectueront deux missions opérationnelles après la guerre.
Ils sont retirés du service actif entre 1954 et 1959. Deux sont utilisés en stations d'entraînement à la lutte contre les sinistres (UTS), jusqu'en 1983 pour le dernier. Un servira de station de recharge à quai (ZAS puis PZS) jusqu'en 1967. Aucun n'est conservé en entier. Le massif du L-8 est transformé pour servir de mémorial pour les disparus du L-19, dans l'enceinte de la base de Maliy Uliss. Un autre massif, celui du L-10, est érigé en mémorial des disparus du L-16 dans l'enceinte de la base de Vilyuchinsk
Je n'ai trouvé qu'une seule référence à un Arrêt Technique Majeur, qui voit entre autres une profonde modification du massif. A cette occasion, la barbette du canon avant disparaît et ce canon est installé de manière plus classique à plat pont. De ce fait, la disponibilité en ligne ne peut être évaluée.
La durée moyenne de construction s'établit à 3,4 ans, la finition en 1,5 ans.
* je n'ai pas réussi à déterminer s'il s'agit de périscopes de Carl Zeiss AG ou de Oficine Galileo, les fournisseurs étrangers de l'époque
Pour la définition exacte de cette appellation, voir à la fiche Numéro tactique
69 |
Pacifique |
01/09/1957 |
B-10 |